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Une constitution, quand elle a consacré les vérités générales du droit naturel, qui appartiennent à toutes les sociétés sans exception, doit s’attacher à instituer l’administration de la chose publique d’une façon qui réponde autant que possible au caractère particulier, aux idées, aux habitudes, aux besoins moraux du peuple : pour lequel on la fait. Sans cela, elle n’est pas praticable, elle ne dure pas. Et alors, au lieu de fonder un ordre de choses stable et productif, elle enfante la confusion et de nouveaux troubles. Qu’on consulte l’histoire à cet égard.

Les sociétés politiques, à mesure qu’elles progressent, changent insensiblement d’idées, de tendances, d’aspirations, de besoins, et partant, de lois. Cela se fait naturellement, par la force des choses ; et cela signifie qu’une constitution, pour être viable, doit être en rapport avec l’esprit de la nation, afin de pouvoir se modifier à mesure que la nation elle-même se modifie sous l’empire des circonstances nouvelles créées par sa marche ascendante vers les progrès.

Une constitution, c’est tout simplement le modus vivendi d’un peuple, la manière dont ce peuple a besoin d’être dirigé pour son plus grand bien possible. Elle est forcément assujettie à la loi des circonstances, loi que le temps seul et l’amélioration des choses peuvent changer. Appliquez brusquement, sans transition, la constitution de la Suisse ou celle des États-Unis d’Amérique à la Russie ou à l’Espagne, ça ne durera pas six mois.