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— Je remercie monsieur le vicomte, mais je n’ai pas du tout d’ambition, et le travail humble, simple, conviendra mieux à ma nature.

La délicatesse de Mitsi, l’instinctive prudence de son âme pétrie par l’enseignement chrétien de la sœur Hélène venaient d’avertir son inexpérience qu’il « fallait » faire cette réponse.

Christian eut un sourire moqueur, tandis que de plus vives clartés passaient dans son regard, attaché sur le jeune visage frémissant, d’un charme si pur, sur les yeux d’une saisissante beauté dont autrefois le jeune vicomte de Tarlay avait dit : « Ce sont des yeux de feu. »

— On voit que vous sortez du couvent, petite fille. Vous ignorez tout de la vie et de ce qu’elle peut vous promettre.

Il s’assit près de son fils et se pencha pour mettre un baiser distrait sur le front de l’enfant.

— Ce voyage s’est bien passé, paraît-il ?

La question s’adressait plus à Mitsi qu’à Jacques. La jeune fille répondit en essayant de raffermir sa voix :

— Très bien, monsieur le vicomte.

— Tant mieux… Mais que faites-vous à rester là debout, Mitsi ? Reprenez donc votre place.

Elle obéit. La rougeur ne quittait pas son visage, et ses doigts un peu tremblants laissèrent échapper le dé d’acier, qui roula aux pieds de Christian.

M. de Tarlay se pencha vivement, le ramassa et le tendit à la jeune fille, qui remercia d’un air timide et confus.

— Voyons, racontez-moi donc ce que vous faisiez à votre couvent ?… et ce qu’on vous y a appris ?

Il parut apporter un réel intérêt aux réponses de Mitsi. Mais celui qui l’eût observé en ce moment se serait convaincu que cet intérêt s’adressait presque