Page:Delly - Mitsi.pdf/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vieil or, Christian s’avança vers le lit et tendit la main au médecin. Ils échangèrent quelques mots au sujet de l’enfant, dont les yeux fatigués s’éclairaient tout à coup… Mitsi s’était reculée à quelque distance. Mais Jacques l’appela :

— Mitsi, ne t’en va pas… dis !

M. de Tarlay se détourna. Mitsi rencontra un regard surpris qui, presque aussitôt, parut vivement intéressé.

— Ah ! la petite Mitsi d’autrefois ?… J’ignorais que vous fussiez ici, Mitsi.

Jacques dit de sa voix faible :

— Elle est ma bonne, et je l’aime beaucoup.

— Ta bonne ?… Ah ! vraiment !

Une lueur d’amusement ironique traversait les yeux d’un bleu foncé, qui s’attachaient longuement sur la jeune fille — si longuement que Mitsi, rougissante, baissa les siens tandis qu’un petit frisson de gêne la parcourait tout entière.

S’adressant au docteur, M. de Tarlay lui fit quelques questions relatives au temps nécessaire pour que Jacques pût être emmené à Rivalles. Puis, après avoir passé un doigt distrait sur la joue de l’enfant qui le regardait avec une sorte d’extase, il sortit de la chambre avec le docteur. Celui-ci, au passage, adressa un signe amical à Mitsi. Christian, lui, eut de nouveau pour elle le même regard d’impérieux intérêt, de troublante hardiesse… Et quand il eut disparu, Mitsi, pendant longtemps, demeura sous l’impression d’un malaise profond, qu’elle ressentit encore les jours suivants quand sa pensée, malgré elle, revenait à M. de Tarlay, évoquait l’élégante et hautaine silhouette, le beau visage dont les traits s’étaient virilisés, en ces cinq années, les yeux superbes et volontaires, qu’elle redoutait de revoir.