Page:Delly - Mitsi.pdf/81

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bablement qu’il n’y avait pas lieu, pour ce motif, d’interrompre son voyage.

Le deuxième jour de la phase la plus critique, le médecin dit à Dorothy, qui l’accompagnait hors de la chambre ;

— Je crois qu’il serait bon de télégraphier à M. de Tarlay que l’état s’est beaucoup aggravé, et que je ne réponds de rien.

Quand l’Anglaise, un peu plus tard, répéta ces paroles à Mitsi, celle-ci dit avec une indignation qu’elle ne put maîtriser :

— Ne devrait-il pas être parti dès la première annonce de la maladie ? Cependant, il doit bien supposer que celle-ci peut être dangereuse pour un enfant aussi chétif ?

— Oh ! ma chère, je crois que M. le vicomte ne s’inquiète guère au sujet de son fils !… au sujet de personne au monde, d’ailleurs. Il ne songe qu’à ses distractions, à son bon plaisir. Le reste est bien peu de chose à ses yeux.

Ce que Mitsi entendait dire par les domestiques concordait bien avec ce portrait du parfait égoïste que traçait la gouvernante. M. de Tarlay semblait en outre être craint de ses serviteurs, qui ne parlaient cependant de lui qu’avec une sorte d’admiration déférente, alors qu’ils ne se gênaient guère pour tomber à l’envi sur la présidente, vaniteuse et exigeante, sur l’avare Parceuil, sur la coquette parasite qu’était Mlle Dubalde.

Ces repas à l’office, en contact avec la domesticité, représentaient pour Mitsi une dure épreuve. Dès le premier jour, elle avait excité la jalousie des femmes et l’attention la plus empressée de la part des hommes. Dans sa tenue de servante, avec sa robe noire, son tablier brodé, son petit bonnet de tulle blanc d’où ressortaient les boucles brillantes de ses