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En Mitsi, elle trouvait un riche terrain qui ne demandait qu’à fructifier. Quand, l’année précédente, elle avait quitté cette maison pour une autre de son ordre où l’envoyaient ses supérieures, elle laissait la jeune fille munie d’un excellent bagage intellectuel, d’une forte culture morale et d’une grande habileté dans les travaux de lingerie, qui étaient une des spécialités du pensionnat.

Ce départ avait été un vif chagrin pour Mitsi. Les autres religieuses se montraient bonnes à son égard, mais aucune ne savait, comme sœur Hélène, la comprendre dans toutes les délicatesses de sa pensée, dans toute la secrète ardeur de son jeune cœur, ni l’encourager, la fortifier, quand elle se sentait pénétrée par l’angoisse de l’avenir.

Que serait-il, cet avenir ?… que décideraient pour elle ceux qui se faisaient appeler ses protecteurs, et dans lesquels, instinctivement, son âme d’enfant avait autrefois deviné des ennemis ?

Chaque année, au jour de l’an, les religieuses lui faisaient écrire à la présidente une lettre, où il était question de reconnaissance, de vœux et de prières. À cette lettre, il n’était jamais répondu. Mais Mme Debrennes, en accusant réception des notes de travail et de conduite que lui envoyait chaque semaine la supérieure, insistait sur la nécessité d’élever « cette pauvre enfant d’origine équivoque » dans l’habitude des humbles travaux et dans la plus entière simplicité.

« Mitsi est destinée au sort le plus modeste », précisait-elle. « Il faut qu’elle soit bien pénétrée de cette idée-là, et je compte sur vous, ma chère sœur, pour le lui répéter souvent. »

Sœur Hélène, quand la supérieure lui lisait des passages de ce genre, hochait la tête en disant :

— Mitsi est distinguée, affinée au moral comme au