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sans se douter que l’inimitié instinctive de Mlle Dubalde à son égard venait de s’augmenter encore, car bien involontairement la petite fille avait interrompu le tête-à-tête sur lequel Florine fondait beaucoup d’espoir pour faire triompher son amour et son ambition, tous deux intéressés à provoquer une déclaration de ce beau Christian à l’humeur fantasque et railleuse, dont on ne savait jamais, comme elle venait de le lui dire tout à l’heure, s’il se moquait ou parlait sérieusement, quand il faisait la cour à une femme.

Léonie, que Mitsi rencontra précisément comme elle arrivait au château, ne se montra pas aussi indulgente que son maître. Quand l’enfant lui eut narré en quelques mots ce qui venait de lui arriver, elle appliqua un soufflet sur la petite joue, en disant :

— Voilà d’abord pour t’apprendre à faire des sottises… Et maintenant file dans ta chambre. Tu y resteras jusqu’à demain, au pain et à l’eau.

Comme elle avait le cœur gros, la pauvre Mitsi !… Comme les larmes coulèrent pressées, brûlantes, sur ses joues en feu, lorsqu’elle se trouva dans l’étroit réduit qui lui servait de chambre !

Quand donc s’en irait-elle d’ici ?… Pourquoi l’y gardait-on, puisqu’elle semblait être désagréable à tous ?… Elle avait bien vu tout à l’heure de quel air méchant la regardait Mlle Dubalde ! La présidente ni M. Perceuil ne semblaient se soucier d’elle, car elle ne les avait plus revus depuis le jour de son arrivée. Il n’y avait que M. Debrennes qui paraissait très bon et qui avait pris son parti contre Florine…, puis M. de Tarlay, qui l’avait sauvée et ne s’était pas ensuite fâché contre elle, ainsi qu’il aurait bien pu le faire. Mais l’enfant sentait, instinctivement, que ceux-là n’étaient pas les arbitres de son sort : le premier par faiblesse, le second par insouciance égoïste.