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puis il se dirigea vers le petit salon voisin pour y prendre une cigarette.

Les doigts de Mitsi tremblaient un peu, tandis qu’ils tournaient machinalement les pages. Un tressaillement agitait le visage menu, qui restait pâle et altéré.

Christian, un instant après, reparut dans le salon des Bergères en demandant avec une indifférence affectée :

— Que comptez-vous faire cet après-midi ?

Elle releva à peine les yeux pour répondre :

— Mais rien de particulier. Je me sens fatiguée aujourd’hui et me contenterai d’une promenade dans les jardins.

Il fit quelques pas vers elle, en disant d’un ton où l’impatience, une sourde colère se mêlaient à l’ironie :

— Je me demande pourquoi vous semblez toujours avoir si peur de me regarder, Mitsi ? Qu’est-ce que je vous inspire donc ?… de l’horreur ? de la haine ? Dites-le-moi franchement, cela vaudrait mieux que votre attitude injurieuse.

Elle se leva d’un mouvement impétueux, et cette fois, ses yeux sombres et douloureux se plongèrent dans ceux de Christian.

— Non, je ne vous le dirai pas ! Non, certes, parce que… parce que…

Elle laissa glisser la revue à terre, et, se détournant brusquement, se dirigea vers la porte-fenêtre ouverte sur la terrasse.

Christian, la bouche crispée par un amer sourire, regarda s’éloigner la souple silhouette vêtue d’une légère soie gris argenté. Le frémissant petit sphinx ne lui avait pas livré son secret. Depuis trois semaines il voyait devant lui ce visage fermé, ces yeux qui essayaient toujours d’échapper à son regard. Mitsi le