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moi, comme vous le dites, voyager me fatiguerait en effet.

C’était donc au Château-Rose que s’en allaient les nouveaux mariés. Un délicieux coupé capitonné de soie mordorée les emportait vers la gare. Mitsi appuyait aux coussins moelleux sa petite tête coiffée d’une toque faite en plumes d’oiseaux rares, qui laissait passer les boucles légères de ses cheveux noirs. Elle tenait les yeux fermés et Christian voyait trembler ses cils, frémir sa bouche délicate que relevait légèrement un pli de souffrance.

— Êtes-vous fatiguée, chère petite Mitsi ?

Il se penchait vers elle, et sa voix prenait des intonations d’une chaude douceur qui ne lui étaient pas habituelles.

Elle répondit faiblement :

— Oui… mais ce n’est rien ; avec un peu de repos, je serai bientôt mieux.

— Vous l’aurez à Rivalles, ce repos… et des soins, de la tendresse… tout ce que je pourrai pour vous rendre heureuse, ma chérie.

Il se penchait davantage, et Mitsi sentit son souffle sur son visage. Alors elle eut un mouvement de recul, un raidissement de tout son être. Ses paupières se soulevèrent et dans le petit visage tout à coup blêmi, glacé, Christian vit des yeux pleins d’effroi, d’affolement, de farouche détresse.

Il se redressa d’un mouvement violent, et dit avec fine colère contenue :

— Vous n’avez donc rien pardonné, quoi que vous en disiez ?… Oh ! rassurez-vous, je ne vous importunerai pas davantage ! C’est de vous seule, de votre confiance en moi que je veux vous tenir. Le jour où cette confiance ne vous manquera plus, Mitsi, vous me le direz.

Elle détourna la tête, comme si elle ne pouvait sup-