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— Mitsi, ne parlez pas ainsi !… car je suis certain que vous ne pensez pas ce que vous dites !

Svengred se penchait pour prendre la main brûlante de la jeune fille. Elle riposta violemment :

— Si, je le pense !… Et vous le lui direz ! Qu’il me laisse en paix, voilà tout ce que je lui demande.

— Vous ne parlez pas raisonnablement, ma chère enfant. Votre ressentiment — d’ailleurs un peu légitime — vous égare, vous cache la situation réelle. Je vous affirme que vous vous trompez au sujet de Christian. Si coupable qu’il ait été, en cédant au sentiment très ardent que vous lui inspiriez, il n’est pas l’homme dépourvu de cœur et de conscience que vous vous imaginez. En toute loyauté, il souhaite vous donner son nom, à la fois pour vous entourer de soins et d’affection, et pour réparer le tort qu’il vous a fait dans votre réputation.

Mitsi demanda, en attachant sur le jeune Suédois ses grands yeux pleins d’angoisse :

— Si je ne l’épousais pas, est-ce que, véritablement, cette réputation resterait compromise ?

— Je veux vous répondre franchement : oui, je le crains.

Il vit frémir les épaules amaigries, sous la cotonnade claire de la robe d’intérieur.

— Et vous, monsieur, croyez-vous que je… que je mérite cette réprobation ?

Il s’écria, dans un élan de toute son âme :

— Oh ! non, non ! Pas un instant je ne l’ai cru !

Le regard douloureux s’éclaira de joie. En serrant la main de Svengred, Mitsi dit ce seul mot :

— Merci !

Puis, le front sur sa main, les paupières baissées, elle s’absorba dans une réflexion que ne troubla pas Svengred. Il voyait trembler ses lèvres, frémir ses longs cils noirs, et pensait avec émotion : « Pauvre