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Une femme surgit d’une pièce voisine. Elle était enveloppée d’une blouse grise maculée de taches graisseuses, coiffée d’un bonnet de tulle noir poussiéreux sous lequel passaient des mèches de cheveux gris. Dans sa face blafarde, deux yeux bleus, durs, aigus, s’abritaient sous de molles paupières sans cils.

Parceuil dit, en poussant légèrement devant lui Mitsi interdite à la vue de cette apparition :

— Voici la jeune fille dont je vous ai parlé, Anna. J’espère que vous vous arrangerez bien toutes deux ?

La femme grimaça un sourire, qui découvrit ses gencives ornées de dents gâtées.

— Oh ! on s’arrange toujours avec moi ! N’ayez crainte, monsieur Parceuil, je soignerai bien votre protégée.

— Allons, je vous la laisse… Au revoir, Mitsi.

Et, tournant les talons, Parceuil s’en fut vers la porte, jusqu’où l’accompagna Anna. Il lui dit rapidement à l’oreille :

— Surtout ne la laissez pas s’échapper !

— Ne vous inquiétez pas ! J’ai mon petit moyen… Et je ne la mettrai au restaurant que lorsqu’elle sera mâtée.

Parceuil sortit vivement, et la femme, derrière lui, ferma la porte à clef.

Toute cette scène avait eu lieu si vite que Mitsi restait encore abasourdie, quand la Bolomeff revint à elle.

— Venez, petite, que je vous montre votre chambre.

Mitsi la suivit d’un pas hésitant. Son cœur était étreint par l’angoisse, car elle avait la subite intuition d’être tombée dans un piège. Mais ne valait-il pas mieux paraître ne point s’en douter, pour tenter de déjouer la machination, si elle existait ?