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fou depuis la mort de sa femme. Il ne veut plus garder Mitsi, et comme je venais à Paris, il a profité de l’occasion pour me confier l’enfant et me charger de vous l’amener.

La femme s’exprimait avec assurance et ne paraissait aucunement gênée par les regards mécontents ou furieux qui s’attachaient à elle.

Parceuil dit avec une colère difficilement contenue :

— Il aurait pu au moins se donner la peine de me prévenir, cet individu, avant de m’expédier cette petite !… J’aurais pris alors des dispositions en conséquence.

— Il n’est guère capable de réfléchir en ce moment, le pauvre !… Et puis, Mitsi ne vous gênera guère, dans ce grand château. Elle est bien élevée, la mignonne, et saura se tenir tranquille.

Parceuil dit brusquement :

— C’est bon, laissez-la, puisqu’il n’y a pas moyen de faire autrement… Que vous dois-je pour votre dérangement et le voyage de l’enfant ?

— Rien du tout, monsieur. Larue m’a donné l’argent nécessaire sur le trimestre que vous lui aviez envoyé… Alors, messieurs, mesdames et la compagnie, je vous salue bien.

Elle se pencha vers l’enfant, qui demeurait immobile, sa main brune, toute petite, serrant convulsivement les gros doigts rouges de la Normande.

— Au revoir, Mitsi. Soyez bien sage, n’est-ce pas ?

La petite fille leva la tête, et cette fois ses yeux apparurent, dans l’ombre du vilain chapeau brun. C’étaient des yeux extraordinairement beaux et vivants, d’un brun velouté, doré, sur lesquels tremblaient de longs cils noirs. En ce moment, ils exprimaient une angoisse telle que le cœur peu sensible de la Normande en fut ému.

— Allons, allons, ma belle, ne vous faites pas de