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LES DEUX FRATERNITÉS

les ouvriers des usines Michot qu’il a entraînés à la grève l’année dernière et qui meurent de faim aujourd’hui. Va donc demander à Moriet ce qu’il envoie aux œuvres de bienfaisance, tandis que sa femme est couverte de diamants et qu’il donne toutes les semaines des dîners fins ! Ah ! la bonne blague !… Mais on y coupe toujours ! Et Prosper se renversa dans son fauteuil avec un rire moqueur.

— Non, vois-tu, ce n’est pas la Chambre qui m’inquiète le plus… Mais avec Labouret, je viendrai à bout de mes ennemis. Je le ferai appeler dès demain, car j’ai précisément plusieurs conférences ces temps-ci. Nous chauffons ferme les ouvriers électriciens, la grève n’est plus qu’une question de jours. Allons, je vais changer de tenue, maintenant. J’en ai assez de faire le « frère des ouvriers » !

Ils se mirent à rire, et Prosper, se levant, se dirigea vers la porte. Au moment de l’ouvrir, il se détourna.

— Irons-nous au théâtre, ce soir ? Morand m’a envoyé des cartes pour les Variétés. Un bon garçon, tout de même ! Il ne nous en veut pas du tout.

— Bah ! il était aussi content que moi de la solution ! Et puis, tu as très bien su arranger la chose. Tu es habile.

— Quelquefois, ma petite ! répliqua le député d’un air suffisant. J’ai assez bien mené ma barque encore aujourd’hui, de façon à m’éviter peut-être de très grandes complications. Quoi-