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LES DEUX FRATERNITÉS

La jeune femme s’éloigna, et Prosper, s’étendant presque complètement dans son fauteuil, se mit à fumer lentement. Peu à peu, la contrariété qu’avait amenée sur sa physionomie la communication de sa sœur s’effaçait, le nouveau député reprenait l’air de complète satisfaction qu’il avait en arrivant chez son beau frère. De fait, Prosper Louviers avait vu hier la réalisation complète du rêve sourdement éclos dans l’âme ambitieuse de l’ouvrier de Vrinot frères. Maintenant, il était un homme arrivé, il avait pris de l’aisance, de la désinvolture, il était et se montrait un personnage important.

Au bout d’un assez long temps, voyant que sa sœur n’apparaissait pas, il se leva, sortit du salon et alla frapper à une porte.

— Allons, Zélie, dépêche-toi !

— Je suis prête… Entre, si tu veux.

Il pénétra dans une chambre luxueuse au milieu de laquelle se tenait Zélie, occupée à apostropher sa femme de chambre en termes qui n’étaient pas des modèles d’aménité ni de distinction.

— Tenez, allez-vous-en, je vous donne vos huit jours ! conclut-elle en lui jetant un carton à la tête. Je ne supporterai jamais d’être servie par de stupides créatures de votre espèce !

La femme de chambre ricana et sortit en levant les épaules et en murmurant :

— Espèce de poseuse !… Et ça se croit une grande dame, tiens !