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LES DEUX FRATERNITÉS

ble, acheva tranquillement Prosper en ouvrant un élégant canif d’écaille, C’est certain… Mais, voyons, que lui reproches-tu au juste ?

— C’est un grigou, un affreux grigou ! Il jette maintenant les hauts cris à la moindre de mes dépenses, il ne veut plus m’accorder la plus légère satisfaction. J’aurais voulu un domestique homme, c’est beaucoup plus chic qu’une femme de chambre !… Ah ! bien oui ! si tu avais entendu ce réquisitoire ! Et pour ma voiture, donc ! Non, ça ne peut pas durer ! Je vais demander le divorce.

Prosper, occupé à couper le bout de son cigare, fronça un peu les sourcils.

— C’est embêtant ! Je ne me soucie pas du tout de me mettre mal avec Morand ! Entre nous, c’est une nullité, mais il est très bien vu dans le parti et pourrait me faire du tort.

Zélie redressa la tête d’un air de Junon irritée.

— Tu ne prétends pas, pourtant, obtenir de moi que je reste rivée à cette chaîne à cause de ton avenir ?

— Ah oui ! si je comptais là-dessus !… Tu crois donc que je ne te connais pas ? dit-il d’un ton moqueur. Divorce si ça te plaît, mais fais la chose en douceur… à l’amiable, comme je le disais tout à l’heure. Il vaudrait même peut-être mieux que ce soit moi qui arrange la chose, car, à vous deux, vous en arriveriez aux paroles trop vives, je le crains.

— Oh ! certainement. Il est parfois d’une violence !… Et il en débite alors ! Heureuse-