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LES DEUX FRATERNITÉS

lui plaît, nous vivons à peu près chacun de notre côté. Cela ne nous empêche pas d’avoir des scènes, quand Madame a besoin d’une grosse somme d’argent pour payer ses fournisseurs lorsqu’ils la tracassent trop, ou quand elle voudrait se donner le luxe d’une voiture personnelle. Mais, tu sais, je commence à en avoir assez ! J’aime ma tranquillité, et un de ces jours, je la planterai là !

Et un coup de poing sur la table ponctua la déclaration du député socialiste.

Prosper Louviers s’était mis à droite du couvert préparé pour la maîtresse du logis. Les paroles de son beau-frère ne semblaient aucunement l’émouvoir, et ce fut avec le plus grand calme qu’il répondit :

— Allons, il faut avoir un peu de patience, Morand ! Zélie est encore jeune, elle aime le monde, les plaisirs, mais ça passera en vieillissant.

— Ah ! tu es bien bon, toi ! S’il faut que j’attende jusque-là, et que je supporte tous les caprices de cette péronnelle ! Non, je ne suis pas de ce bois-là, mon garçon ! Tu es bien tranquille, toi, au moins ! Te voilà veuf, et millionnaire ! Heureux mortel !

Prosper se mit à rire, tandis qu’une brève lueur d’orgueilleuse satisfaction traversait son regard.

— Je me trouve assez bien partagé, c’est certain. Et hier, les électeurs m’ont procuré ce