quefois, Zélie, mais cela n’empêche qu’au fond nous avons les mêmes idées, les mêmes désirs…
— Et les mêmes haines ! acheva-t-elle sourdement. Dire que nous travaillons pour tous les bourgeois, que leur luxe est fait de nos privations !… Misère ! Quand écraserons-nous tout ça ?
Et sa main eut un geste si brusque qu’une assiette posée près d’elle glissa à terre et se brisa sur le sol carrelé.
— Casse pas la vaisselle, ma petite ! C’est pas les bourgeois qui nous en payeront d’autre…
Un coup frappé à la porte l’interrompit. Zélie se leva et alla ouvrir.
— Tiens, c’est toi, Cyprien !
— Moi-même, en chair et en os, cousine. La concierge m’a demandé en passant de vous remettre cette lettre, qui est pour Prosper et pour toi.
— Une lettre ?… Tiens, de qui donc ? Merci, Cyprien. Entres-tu un instant ?
— Non, il est un peu tard, je te remercie, Zélie. Bonsoir, tous les deux.
— Bonsoir, Cyprien, répondirent le frère et la sœur.
Zélie referma la porte et revint vers la table. Prosper demanda, tout en piquant son couteau dans une tranche de saucisson :
— De qui, la lettre ?
— Connais pas… Une grande enveloppe… timbrée de Paris. Elle est adressée à M. et Mlle Louviers…