Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/201

Cette page a été validée par deux contributeurs.
199
LES DEUX FRATERNITÉS

pâle, et que la fièvre commençait à empourprer maintenant. Une émotion profonde s’était emparée d’elle, depuis l’instant où elle avait vu cette étrangère étendue là, si semblable par les traits à son fils aîné. Cette émotion était plus que la pitié produite par l’état où se trouvait la jeune fille ; il s’y mêlait un sentiment que Micheline n’aurait su expliquer, mais qui l’attirait impérieusement vers cette malheureuse enfant.

La fièvre augmentait, l’oppression arrivait. Louis et Lucien étaient partis à leur travail. Micheline ne pouvait songer à laisser la malade seule pendant qu’elle irait chercher le médecin. Elle ouvrit la porte de la loge et vit sur le perron de l’hôtel un domestique en tenue de travail qui secouait un tapis.

— Monsieur Romain, appela-t-elle.

Il tourna la tête vers elle et demanda :

— Qu’est-ce qu’il y a, madame Mariey ?

— Est-ce que vous pourriez me rendre un service ? Courir chez le docteur Murand pour qu’il vienne tout de suite ?

— C’est pour la malheureuse que vous avez ramassée ce matin, m’a raconté M. Lucien ?

— Oui, elle me paraît beaucoup plus malade.

— Bon, j’y vais, madame Mariey, le temps d’endosser un veston.

Micheline retourna s’asseoir près de la jeune fille. Celle-ci commençait à s’agiter, le délire arrivait, des phrases sans suite s’échappaient de sa gorge haletante.