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LES DEUX FRATERNITÉS

Malgré sa faiblesse, Claudine se dressa, les mains étendues dans un geste de protestation.

— Moi, devenir sa femme ! Endurer cet esclavage ma vie entière ! Oh ! jamais !

Prosper se leva brusquement ; il lui saisit le poignet en l’enveloppant d’un regard furieux.

— Jamais ? Tu oses le dire, alors que tu es la cause de son acte de désespoir ? Je me suis contraint jusqu’ici à te parler avec tranquillité, malgré la colère et le ressentiment qui remplissent mon âme. Mais je ne souffrirai pas de résistance. Je veux, je veux que tu épouses Alexis, car je sais que sans cela il recommencera.

— Jamais ! jamais ! dit-elle avec énergie.

Il lui secoua le poignet avec violence.

— Je le veux, entends-tu ? Cela se fera, et si tu lui montres que tu n’acceptes qu’à contrecœur, prends garde à toi ! Je te laisse jusqu’à demain pour prendre un autre visage.

— Demain sera comme aujourd’hui. Ne comptez jamais que je me prêterai à cette hypocrisie ! s’écria-t-elle avec indignation.

— Ah ! tu veux résister ! Eh bien ! demain, si ta réponse n’est pas ce que je veux, je te chasse de chez moi, tu t’en iras errer sur la voie publique, et il n’y aura plus rien de commun entre nous ! Cela, je le ferai, je te le jure ! La soumission complète, ou bien dehors !

Il lâcha le poignet de la jeune fille si brusquement qu’elle s’affaissa à terre, et sortit en frappant la porte avec violence.