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LES DEUX FRATERNITÉS

— C’est tout près d’ici, la villa Lætitia. Mais vraiment je suis au regret…

Elle ne vit pas la brève impression de contrariété qui passait dans le regard du jeune homme à ces mots : « la villa Lætitia ».

— C’est tout près, en effet, dit-il d’un ton contraint. Appuyez-vous sur moi, vous ne craindrez rien ainsi.

Elle se laissa conduire, une sorte de brouillard tombait sur son regard et lui voilait tous les objets alentour.

À la grille de la villa Lætitia, un domestique était occupé à astiquer le cuivre de la boîte aux lettres. Le lieutenant s’arrêta en disant :

— Maintenant, vous voilà chez vous, madame.

Elle leva vers lui son regard qui reprenait peu à peu sa lucidité et exprimait une vive reconnaissance.

— Je vous remercie, monsieur. Sans vous, je serais tombée là.

Il s’inclina en répliquant :

— Je suis heureux que l’appui de mon bras ait pu vous éviter cet accident, madame.

Elle rencontra le sérieux et profond regard de ses grands yeux gris où passait une sorte de compassion, inspirée sans doute par la triste mine de sa jeune voisine. Ce regard adoucissait singulièrement la physionomie un peu froide et hautaine du jeune officier ; il lui donnait un charme indéfinissable qui frappa Claudine.

Elle lui adressa un nouveau remerciement