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LES DEUX FRATERNITÉS

Prosper eut un brusque mouvement.

— De Mollens ?

— Tu connais ça ?

Les lèvres de Prosper eurent une brève crispation.

— Oui, autrefois. Il a cherché à me jouer un tour, dans une conférence.

— Ah ! oui, avec ce coquin de Cyprien !

Les traits du député se contractèrent un peu. Il attira à lui un compotier rempli de fraises au parfum délicieux et s’en servit machinalement plein son assiette.

— Tiens, tu aimes donc tant que cela les fraises, maintenant ? fit observer Zélie.

Il eut un geste d’impatience et versa dans l’assiette de Claudine une partie du contenu de la sienne !

— Mais je n’en voulais pas ! murmura la jeune fille avec un mouvement de protestation.

— Avale-les tout de même. Tu m’ennuies à manger du bout des lèvres et à faire la mijaurée sur chaque plat, comme si la cuisine ne te plaisait pas. Ma cuisinière n’est peut-être pas assez bonne pour toi ?

Elle rougit sous cette froide raillerie et répondit d’une voix qui frémissait un peu :

— Vous savez bien, au contraire, que je ne suis pas difficile. Mais je n’ai plus faim du tout depuis quelque temps.

— Simagrées, tout ça ! dit Prosper en levant les épaules.