Page:Delly - La Petite Chanoinesse.pdf/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.
10
LA PETITE CHANOINESSE

de sa fille, et fit le geste de repousser les lettres dans un tiroir.

Mais Sari se mit à rire.

— Oh ! tu n’as pas à me faire mystère de ta correspondance, maman ! Je sais que tu te charges de fournir des renseignements à certaines puissances désireuses d’avaler quelque jour la France, et toute l’Europe avec. C’est ton affaire, et je n’y trouve rien à redire, d’autant plus que ton petit trafic nous permet de mener la vie mondaine que nous aimons.

Elle parlait à mi-voix. Cependant, sa mère lui fit signe de se taire, puis chuchota :

— On ne sait jamais… Il faut de la prudence…

— Bien, j’en aurai… Mais tu sais, si j’arrive jamais à devenir comtesse de Chancenay, il faudra laisser là ces sortes d’affaires ?

— Naturellement ! Nous n’en aurions plus besoin, d’ailleurs… Voyons, cela s’arrange-t-il à ton gré, petite ?

Sari secoua la tête. Une lueur de contrariété passait dans ses yeux, qui devenaient presque noirs… Elle mit un genou sur le petit divan placé près du bureau, et appuya au dossier de velours ses bras nus, très blancs, sortant d’une courte manche de tulle rose.

Mme Doucza demanda, d’un ton inquiet :