Page:Delly - La Petite Chanoinesse.pdf/113

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
102
LA PETITE CHANOINESSE

profond, éclairait un visage aux traits fins, à la bouche pensive. Une âme forte et aimante s’y révélait — une âme qui avait soutenu, guidé, entraîné vers le bien Jean de Chancenay, devenu très jeune l’époux de cette femme d’élite.

Et Ogier, plus d’une fois, s’était pris à penser qu’élevé par ce père et cette mère, il connaîtrait sans doute aujourd’hui la satisfaction de mener une existence utile, de remplir des devoirs, d’être autre chose, enfin, qu’un des personnages en vue de la haute élégance et un sportsman très chic, dont les écuries, la meute, le yacht ne laissaient rien à désirer.

À l’ordinaire, il ne s’attardait pas en ces pensées. Mais ce matin, elles s’imposaient à lui avec plus de force. Un regret s’insinuait en son cœur — regret de n’être pas cet homme qu’eût fait de lui l’éducation maternelle, et qui eût été plus digne de l’enfant toute pure qu’il aimait. Il l’imaginait, cet autre Ogier, officier comme son père, sérieux, conscient de ses devoirs, noblement soumis à une discipline morale. Celui-là n’aurait pas la désagréable impression de se mépriser quelque peu lui-même, par moments…

Le jeune homme secoua les épaules, avec impatience. Il chassait toujours très vite ces intempestifs reproches d’une conscience que le monde, -