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L’ONDINE DE CAPDEUILLES


— Vous voulez parler de sa candeur idéale de petite fleur trop préservée ? Oui, je dis trop. Nous nous le reprochons maintenant, son grand-père, Mme  Geniès et moi. Une connaissance précoce de la vie est mauvaise ; l’ignorance de tout ne l’est pas moins, surtout quand on est destiné, comme Roselyne, à se trouver bientôt seule, sans protection familiale — seule pour lutter et se défendre.

Il passa lentement sur son front chauve ses gros doigts noueux, déformés par les rhumatismes.

— … Mais c’était si tentant de laisser à cette petite âme toute sa ravissante blancheur de lis ! Personne n’osait, monsieur… personne de nous.

— Je le comprends un peu, puisque moi-même, qui suis cependant une sorte de mécréant, je n’en aurais pas le courage. Mais enfin, c’est déraisonnable… complètement déraisonnable, avouez-le ?

— Oh ! je l’avoue ! Et elle pourra nous adresser plus tard des reproches, pauvre petite… Que pensez-vous de l’état de son grand-père, monsieur ?

— Je l’ai trouvé mieux aujourd’hui. Mais hier mon impression a été mauvaise.

Le prêtre dit en baissant la voix :

— Il n’a plus que quelques mois à vivre, d’après le médecin, en admettant qu’il ne survienne pas de complication foudroyante.

Odon murmura :