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Malheureusement, elle ne pouvait monter dans la grande chambre qui occupait presque tout le premier étage du logis. C’était là qu’était morte Varvara. Des meubles de chêne massifs et vermoulus, un grand fauteuil recouvert de velours d’Utrecht fané, une table avec son tapis fait d’un voile indien, des rideaux de drap usé aux fenêtres, tel était le décor où avait vécu depuis deux ans cette femme jeune et belle. Les murs étaient tendus d’une tapisserie à personnages, qui partout montrait la trame. Et dans un de ces murs, il y avait une cachette. Un jour que Gwen, malade, était couchée dans la chambre de sa mère, elle avait vu Varvara soulever la tapisserie, appuyer sur quelque chose. Une sorte de petite armoire s’était ouverte. Gwen se rappelait bien l’endroit de la tapisserie ; il y avait là un homme avec un grand casque emplumé. Quand elle pourrait aller dans la chambre, elle essayerait d’ouvrir cette petite armoire. Mais jamais elle n’en parlerait à personne. Ce serait son secret à elle toute seule.

Un aboiement, tout proche de la maison, la fit sursauter. Elle pensa : « Il faut bien que je parte ! Mais je reviendrai. »

Par le même chemin, elle quitta la maison. Comme elle sortait, deux chiens bondirent sur elle, et l’un d’eux lui enfonça ses crocs dans la jambe. Elle jeta un cri, tomba sur l’herbe rase de la lande.