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GWEN, PRINCESSE D’ORIENT

s’amusait à nous dresser les unes contre les autres comme des bêtes sauvages, ivres de fureur. Années atroces, dont le souvenir brûle encore mon âme ! Pauvre âme, que cet homme avait réduite à la pire misère et qu’il conduisait au désespoir !

« Mais quelles que fussent mes fautes, Dieu ne m’abandonnait pas. Il m’envoya enfin un tel sursaut d’horreur que mes chaînes morales tombèrent. J’éprouvai l’irrésistible désir de fuir, loin, le plus loin possible de celui que tout à coup je haïssais, après avoir si follement subi son infernale emprise. Une nuit, je quittai la villa, emportant mon fils — mon petit Willy dont, hélas ! la ressemblance physique avec son père s’avérait déjà si frappante.

« Je me réfugiai à New York, dans une maison meublée de prix modeste. J’avais emporté des bijoux dont je vendis quelques-uns. Mais je n’étais pas là depuis huit jours quand un matin, rentrant de chercher du travail, je ne retrouvai plus mon fils dans la chambre où je l’avais laissé.

« La tenancière de la maison meublée n’avait vu personne, ne s’était aperçue de rien. Je ne doutai pas un instant que Gordon n’eût découvert ma retraite et fait enlever l’enfant.

« Sans plus réfléchir, je retournai à la villa. Gordon y était. Je lui réclamai mon fils. Il me répondit que, ayant fui sa demeure, je ne le