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V.


Mlle  de Regbrenz attend Mademoiselle, dit la vieille Bretonne qui introduisait Alix à Ker-Neven.

Alix la suivit jusqu’à une grande pièce sobrement ornée de beaux meubles en noyer clair, près desquels ressortaient avec vigueur les draperies bleu sombre. Une large baie vitrée, sans rideaux, éclairait cette pièce en laissant entrevoir la perspective d’un vaste jardin, légèrement blanchi par la neige.

Dans la profonde embrasure de cette baie, et à demi étendue sur une chaise longue, se trouvait une jeune dame maigre, légèrement contrefaite. Son visage irrégulier, creusé et jauni par la souffrance, était éclairé et comme immatérialisé par le doux regard de ses yeux bruns… Ceux-ci, en cet instant, se fixaient ardemment sur la porte et, quand Alix parut, une voix chaude, un peu tremblante, l’accueillit par ces mots :

— Enfin, vous voici, ma petite cousine, la fille de ma chère Gaétane !… Que c’est bon à vous de venir embrasser votre pauvre parente !

Elle lui tendait les bras et, d’un mouvement spontané, Alix vint s’y jeter… Alors l’enfant courageuse, qui avait su si bien comprimer ses déchirements et ses angoisses, laissa couler ses larmes. En sanglotant, elle appuyait sa tête sur l’épaule de cette parente, inconnue tout à l’heure. Elle venait de devi-