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— Parce qu’elle ne nous en parle pas et empêche que nous en parlions… J’ai bien vu cela, dit-il d’un ton profond.

… Vers la fin de cet après-midi, Alix et ses frères gagnèrent la petite plage située à l’extrémité du parc. La jeune fille éprouvait le besoin d’échapper, pour quelques instants, aux impressions attristantes de cette journée, en s’éloignant du manoir où régnait Mme Orzal… Georgina, en effet, s’occupait seule de la nouvelle organisation. Retirés dans le salon du rez-de-chaussée de la tour, les deux vieillards demeuraient en dehors de tout le mouvement.

Dans la pièce où Gaétan et Xavier avaient joué naguère, et qui était destinée à subir une entière restauration, Mme Orzal faisait placer provisoirement le mobilier du grand salon, ainsi que le piano d’Alix. La chambre de M. de Sézannek était destinée à M. de Regbrenz et les œuvres d’art, les objets précieux seraient distribués au gré de Georgina. Bien peu monteraient au premier étage de la tour de Saint-Conan… C’était la prise de possession entière et sans réplique.

Il y avait là, pour Alix, mille piqûres, des souffrances, petites en apparence, mais fort pénibles à une âme délicate et sensible… La jeune fille éprouva une sensation d’apaisement en se trouvant en présence de la mer, son amie déjà depuis ces quelques jours. Les vagues, un peu fortes, faisaient entendre un bruit régulier et sourd, le seul qui rompît l’imposant silence de cette fin de jour. Dans un lointain grisâtre, le soleil s’effaçait progressivement en répandant sa pâle lumière sur les flots assombris… Là-bas, une barque dansait sur l’onde agitée, mais, gouvernée par une main habile, elle se dirigeait droit sur le petit promontoire. Bientôt elle accosta et l’homme qui s’y trouvait sauta à terre. Ayant amarré son embarcation, il s’en alla vers la maisonnette, y