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les salles abandonnées et la désagréable apparition du peu avenant inconnu, qu’elle avait un instant supposé être son oncle Even.

— Il faudra que je m’informe près de Mathurine, conclut-elle. Mais comme il est étonnant que nous n’ayons pas encore vu mon oncle !… Oh ! miss Esther, ne pensez-vous pas que nous avons là une singulière famille ?

Sans répondre, miss Elson hocha doucement la tête. Son esprit, très juste et observateur, avait eu vite fait de pressentir, pour la nature aimante d’Alix, bien des blessures dans ses rapports avec sa parenté maternelle — des heurts terribles, peut-être, pour cette enfant charmante et extrêmement sensible. Les insondables lueurs du regard de Georgina donnaient fort à penser à l’Anglaise et, plus que jamais, elle se félicitait d’avoir suivi la jeune fille, encore inexpérimentée.

Une certaine impatience agitait Alix en attendant le déjeuner auquel, peut-être, assisterait le mystérieux personnage de tout à l’heure. Elle espérait voir Mathurine venir annoncer le repas et se préparait à l’interroger, mais ce fut le vieux visage de Fanche qui apparut dans l’entrebâillement de la porte.

— Vous êtes servis, dit-il laconiquement.

— Merci, Fanche, nous y allons tout de suite…Mais dites-moi… (et Alix se rapprochait du paysan) dites-moi donc, Fanche, si quelqu’un d’autre que M. Even de Regbrenz habite en ce moment la vieille tour.

Il la regarda de ses yeux vagues en répétant lentement :

— La vieille tour ?… Quelle tour ?

— Mais la tour de la comtesse Anne…

Il recula de trois pas. Sur sa face décomposée, Alix lut une véritable terreur.

— La tour de… Non ! non ! il n’y a personne…