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plus ancré en lui qu’on ne le pense généralement… Que regardez-vous là, Jeanne ?

Mlle Sérand s’était baissée et ramassait l’enveloppe qui avait contenu la lettre de M. de Regbrenz. Avant de répondre, la jeune fille examina attentivement la suscription.

— Voilà une écriture féminine révélatrice d’un terrible caractère ! déclara-t-elle enfin.

— Féminine !… C’est celle du grand-père d’Alix, Jeanne.

La jeune fille secoua la tête en signe de dénégation.

— C’est une femme, vous dis-je, miss Elson ; et une femme ambitieuse au plus haut point, habile, intelligente, sans scrupule…

— C’est avec ta graphologie que tu découvres toutes ces qualités ? dit le docteur d’un air narquois. Tu sais quelle créance j’y ajoute…

— Vous avez tort, papa, absolument tort. C’est une science précieuse, qui me fera découvrir le mari idéal… Mais j’oubliais dans quel but je me trouvais ici. Maman vous envoie prévenir que le dîner n’attend que vous, papa.

— Bon, je monte… Alix, vous allez tous venir dîner avec nous. Pas de refus, ma femme vous attend.

— Et j’emmène Xavier en gage ! s’écria Jeanne en s’emparant du petit garçon, lequel était complètement éveillé et se laissa entraîner par l’exubérante jeune fille.

Dans l’état d’esprit où se trouvait Alix, elle eût cent fois préféré déjeuner en famille, malgré la tristesse de la grande salle à manger où la place du père demeurait vide. Mais elle ne voulut pas désobliger l’excellent docteur et le suivit au second étage… Pendant ce repas, qui lui parut interminable, elle eut de continuelles distractions, ses pensées s’en