Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ombre de croyances… Et, désormais, possédée de la haine de Dieu, dirigée par celui qui s’était fait son initiateur, elle employa toutes les ressources de son intelligence, toutes les séductions et les souplesses de son esprit à ruiner la foi autour d’elle. Sa volonté de fer aidant, elle n’y réussit que trop, surtout près de mon père… et parfois, Alix, je dois te l’avouer, je sentis, sous l’influence de ses discours néfastes, faiblir la foi vive qui me guidait et me soutenait.

» Tu ne t’es pas doutée de ces défaillances, mon amie, car j’ai toujours eu la force de cacher à tous mes souffrances… et mes humiliations, hélas ! Quel déchirement de voir un père tendrement admiré et respecté perdre la notion de toute loyauté, de toute dignité !… Et, à mesure que « empire de Georgina devenait sur lui plus absolu, son attitude se faisait envers moi plus indifférente. Où étaient nos conversations, nos lectures, nos promenades de jadis, notre confiance réciproque, si douce, et cette tendresse qui semblait inébranlable ?…

» Bientôt ce fut de l’hostilité que je découvris en ce père toujours aimé, mais chaque jour prévenu contre moi par de sourdes insinuations. Il n’était pas dans ma nature de dissimuler mes impressions et, franchement, je les lui laissai voir… ; ce qui fut habilement exploité contre moi. Celle qui avait été sa fille préférée devint l’objet d’une véritable aversion, et, son caractère s’aigrissant sous l’influence du despotisme de Georgina, il s’unit à elle dans ses attaques incessantes contre tout ce que je croyais, aimais et estimais… La vie devenait intolérable dans ce Bred’Languest tant aimé, où j’étais désormais l’objet d’une animosité grandissante. Seule Mathurine me demeurait inviolablement attachée. Malgré tous mes efforts, ma pauvre maman était définitivement annihilée par Georgina, et Even, ne venant qu’aux vacances, ne s’apercevait