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— Mais elle avait déjà souffert pendant son enfance ? Elle était depuis longtemps exposée aux persécutions de sa sœur ?

— Oui, mais, jusque-là, les menées de Georgina étaient sourdes. Elle préparait les voies… La jalousie ayant atteint son paroxysme, ce fut alors que Gaétane put se rendre compte de toute la noirceur de cette âme…

Mlle de Regbrenz s’interrompit et changea de sujet, mais une ombre de tristesse demeura sur sa physionomie.

… En entrant, ce soir-là, dans la salle à manger, Alix rencontra le regard de Georgina, singulièrement inquisiteur, et la voix charmeuse de Mme Orzal lui lança cette interrogation :

— Qu’avez-vous donc fait cet après-midi, Alix ? Les offices ont-ils été à ce point interminables ?

— Non, certes, répondit paisiblement Alix sans se troubler sous le feu des belles prunelles brillantes. Nous avons seulement profité largement de cette admirable journée, puisqu’il y avait vacances complètes.

— Vraiment !… Par cette étouffante chaleur, vous avez arpenté les grands chemins, alors que les ombrages vous attendaient ici ?

— Ils ne manquent pas non plus autour du village, madame, et, malgré les charmes indéniables de Bred’Languest, les enfants préfèrent toujours un peu d’imprévu pour les journées de fête.

— C’est évident, répondit Mme Orzal dont les yeux ne quittaient pas la physionomie impénétrable de sa nièce. Je pense comme vous et souhaiterais procurer à ces enfants un peu de distraction… Par exemple, seriez-vous satisfait d’avoir un camarade, Gaétan ?

Il leva vers elle son regard profond et répondit avec tranquillité :