Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suis pas un butor et je sais où je vais. Je suis bien sûr que ces ministres auraient dit leur mot bien volontiers sur l’Orient. Je leur ai conté, pour y aboutir, mes souvenirs d’une croisière en mer Rouge aux côtes de Palestine et, tout naturellement, Jérusalem est venue sur la nappe. Ce diable de Thülow, qui a un répertoire de bibliothèque de gare, a parlé de leur Loti, qui affectionne, disent les dames, la ville des Juifs. J’ai bien essayé, par Loti, d’aboutir à quelques considérations sur la Jeune Turquie, mais Thülow ne m’en a pas laissé le loisir. J’étais furieux.

L’habitude des propos officiels m’a rendu ma tranquillité, mais, réellement, j’aurais aimé, une fois, parler avec un peu d’abandon.

Achille Henry a dit une énormité, je crois que c’était exprès. Comme il vantait la beauté du Frédéric, je lui dis que j’étais à peu près décidé à faire, au mois d’août, une croisière dans la mer du Nord et la Baltique.

Il me répliqua, avec un gros sourire innocent, très bien imité :

— On dit même que toute l’escadre allemande s’apprête a appuyer la croisière, avec tous ses canons en activité.

C’était si direct que ça n’a déplu à personne. Je lui ai répondu :

— Voulez-vous me faire le plaisir d’être mon