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Tantôt dans un lit creux, qu’un noir taillis ombrage,
Cachant son onde agreste et sa course sauvage,
Tantôt à plein canal présentant son miroir,
Je le vois sans l’entendre, ou l’entends sans le voir.
Là, ses flots amoureux vont embrasser des îles.
Plus loin, il se sépare en deux ruisseaux agiles,
Qui, se suivant l’un l’autre avec rapidité,
Disputent de vitesse et de limpidité ;
Puis, rejoignant tous deux le lit qui les rassemble,
Murmurent enchantés de voyager ensemble.
Ainsi, toujours errant de détour en détour,
Muet, bruyant, paisible, inquiet tour-à-tour,
Sous mille aspects divers son cours se renouvelle.

Mais vers ses bords riants la rivière m’appelle.
Dans un champ plus ouvert, noble et pompeux tableau,
Son onde moins modeste en larges nappes d’eau
Roule, des feux du jour au loin étincelante.
Elle laisse au ruisseau sa gaieté pétulante,
Et son inquiétude et ses plis tortueux.
Son lit, en longs courants, des vallons sinueux
Suivra les doux contours et la molle courbure.

Si le ruisseau des bois emprunte sa parure,