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Voyez l’if et le lierre, et le pin résineux,
Le houx luisant, armé de ses dards épineux,
Et du laurier divin l’immortelle verdure,
Dédommager la terre et venger la nature.
Voyez leurs fruits de pourpre et leurs glands de corail
Au vert de leurs rameaux mêler un vif émail.
Au milieu des champs nus leur parure m’enchante,
Et plus inespérée en paroît plus touchante.
De vos jardins d’hiver qu’ils ornent le séjour.
Là, vous venez saisir les rayons d’un beau jour.
Là, l’oiseau, quand la terre ailleurs est dépouillée,
Vole, et s’égaie encor sous la verte feuillée,
Et trompé par les lieux ne connoît plus les temps,
Croit revoir les beaux jours et chante le printemps.

Ainsi ce doux réduit plaît sans être factice.
Mais les jardins des rois avec plus d’artifice,
Avec plus d’appareil triomphent des hivers.
J’en atteste, ô Mouceaux, tes jardins toujours verts.
Là, des arbres absents les tiges imitées,
Les magiques berceaux, les grottes enchantées,
Tout vous charme à la fois. Là, bravant les saisons,
La rose apprend à naître au milieu des glaçons ;