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Se plaît à parcourir dans sa vaste étendue,
De ces bords variés la forme inattendue ;
Il s’égare, il se joue en ces replis nombreux ;
Tour-à-tour il s’enfonce, il ressort avec eux ;
Sur les tableaux divers que leur chaîne compose
De distance en distance avec plaisir repose :
Le bois s’en agrandit, et, dans ses longs retours,
Varie à chaque pas son charme et ses détours.
Dessinez donc sa forme, et d’abord qu’on choisisse
Les arbres dont le goût prescrit le sacrifice.
Mais ne vous hâtez point ; condamnez à regret :
Avant d’exécuter un rigoureux arrêt,
Ah ! songez que du temps ils sont le lent ouvrage,
Que tout votre or ne peut racheter leur ombrage,
Que de leur frais abri vous goûtiez la douceur.

Quelquefois cependant un ingrat possesseur,
Sans besoin, sans remords les livre à la cognée.
Renversés sur le sein de la terre indignée,
Ils meurent ; de ces lieux s’exilent pour toujours
La douce rêverie et les discrets amours.
Ah ! par ces bois sacrés, dont le feuillage sombre
Aux danses du hameau prêta souvent son ombre,