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Il en faut avec soin embellir les dehors.

Avant tout, n’allez point, symétrisant leurs bords,
Par vos murs de verdure et vos tristes charmilles
Nous cacher des forêts les nombreuses familles :
Je veux les voir ; je veux, perçant au fond des bois,
Voir ces arbres divers qui croissent à la fois ;
Les uns tout vigoureux et tout frais de jeunesse,
D’autres tout décrépits, tout noueux de vieillesse ;
Ceux-ci rampants, ceux-là, fiers tyrans des forêts,
Des tributs de la sève épuisant leurs sujets :
Vaste scène, où des mœurs, de la vie et des âges,
L’esprit avec plaisir reconnoît les images.

Près de ces grands effets, que sont ces verts remparts,
Dont la forme importune attriste les regards,
Forme toujours la même, et jamais imprévue ?
Riche variété, délices de la vue,
Accours, viens rompre enfin l’insipide niveau,
Brise la triste équerre et l’ennuyeux cordeau.
Par un mélange heureux de golphes, de saillies,
Les lisières des bois veulent être embellies.
L’œil, qui des plants tracés par l’uniformité
Se dégoûte, et s’élance à leur extrémité,