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C’est par eux que l’on peut varier ses dessins,
Rapprocher, et tantôt repousser les lointains,
Réunir, séparer, et sur les paysages
Étendre, ou replier le rideau des ombrages.

Vos groupes sont formés : il est temps que ma voix
À connoître un peu d’art accoutume les bois.

Bois augustes, salut ! vos voûtes poétiques
N’entendent plus le barde et ses affreux cantiques ;
Mais un plus doux délire habite vos déserts,
Et vos antres encor nous instruisent en vers.
Vous inspirez les miens, ombres majestueuses !
Souffrez donc qu’aujourd’hui mes mains respectueuses
Viennent vous embellir, mais sans vous profaner ;
C’est de vous que je veux apprendre à vous orner.

Les bois peuvent s’offrir sous des aspects sans nombre :
Ici, des troncs pressés rembruniront leur ombre :
Là, de quelques rayons égayant ce séjour,
Formez un doux combat de la nuit et du jour.
Plus loin, marquant le sol de leurs feuilles légères,
Quelques arbres épars joueront dans les clairières,
Et flottant l’un vers l’autre, et n’osant se toucher,
Paraîtront à la fois se fuir et se chercher.