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Les troupeaux, les pasteurs, et leurs jeux et leur danse ;
Saisissez leur secret, plantez en abondance
Ces souples arbrisseaux, et ces arbres mouvants,
Dont la tête obéit à l’haleine des vents ;
Quels qu’ils soient, respectez leur flottante verdure,
Et défendez au fer d’outrager la nature.
Voyez-la dessiner ces chênes, ces ormeaux ;
Voyez comment sa main, du tronc jusqu’aux rameaux,
Des rameaux au feuillage, augmentant leur souplesse,
Des ondulations leur donna la mollesse.
Mais les ciseaux cruels… Prévenez ce forfait,
Nymphes des bois, courez. Que dis-je ? c’en est fait :
L’acier a retranché leur cime verdoyante ;
Je n’entends plus au loin sur leur tête ondoyante
Le rapide Aquilon légèrement courir,
Frémir dans leurs rameaux, s’éloigner, et mourir :
Froids, monotones, morts, du fer qui les mutile
Ils semblent avoir pris la raideur immobile.

Vous donc, dans vos tableaux amis du mouvement,
À vos arbres laissez leur doux balancement.
Qu’en mobiles objets la perspective abonde :
Faites courir, tomber et rejaillir cette onde :