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C’est mieux que la nature, et cependant c’est elle ;
C’est un tableau parfait qui n’a point de modèle.
Ainsi savoient choisir les Berghems, les Poussins.
Voyez, étudiez leurs chefs-d’œuvre divins :
Et ce qu’à la campagne emprunta la peinture,
Que l’art reconnoissant le rende à la nature.

Maintenant des terreins examinons le choix,
Et quels lieux se plairont à recevoir vos lois.
Il fut un temps funeste où, tourmentant la terre,
Aux sites les plus beaux l’art déclaroit la guerre,
Et, comblant les vallons et rasant les coteaux,
D’un sol heureux formoit d’insipides plateaux.
Par un contraire abus l’art, tyran des campagnes,
Aujourd’hui veut créer des vallons, des montagnes.
Évitez ces excès. Vos soins infructueux
Vainement combattroient un terrein montueux ;
Et dans un sol égal, un humble monticule
Veut être pittoresque, et n’est que ridicule.

Désirez-vous un lieu propice à vos travaux ?
Loin des champs trop unis, des monts trop inégaux,
J’aimerois ces hauteurs où, sans orgueil, domine
Sur un riche vallon une belle colline.