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Où peut-être des cœurs en secret malheureux
À l’inflexible autel se plaignoient de leurs nœuds,
Et pour des souvenirs encor trop pleins de charmes,
À la religion déroboient quelques larmes ;
Tout parle, tout émeut dans ce séjour sacré.
Là, dans la solitude en rêvant égaré,
Quelquefois vous croirez, au déclin d’un jour sombre,
D’une Héloïse en pleurs entendre gémir l’ombre.
Mettez donc à profit ces restes précieux,
Augustes ou touchants, profanes ou pieux.

Mais loin ces monuments dont la ruine feinte
Imite mal du temps l’inimitable empreinte,
Tous ces temples anciens récemment contrefaits,
Ces restes d’un château qui n’exista jamais,
Ces vieux ponts nés d’hier, et cette tour gothique,
Ayant l’air délabré, sans avoir l’air antique,
Artifice à la fois impuissant et grossier.
Je crois voir cet enfant tristement grimacier,
Qui, jouant la vieillesse et ridant son visage,
Perd, sans paroître vieux, les grâces du jeune âge.
Mais un débris réel intéresse mes yeux.
Jadis contemporain de nos simples aïeux,