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L’aigle, qui se jouoit au milieu de l’orage,
Oublier aujourd’hui dans une indigne cage
La fierté de son vol, et l’éclair de ses yeux ?
Rendez-lui le soleil et la voûte des cieux :
Un être dégradé ne peut jamais nous plaire.

Mais tandis qu’étalant leur parure étrangère,
Ces hôtes différents semblent briguer mon choix,
Mon odorat charmé m’appelle sous ces toits
Où, de même exilés et ravis à leur terre,
D’étrangers végétaux habitent sous le verre.
Entourez d’un air doux ces frêles nourrissons.
Mais vainqueur des climats, respectez les saisons ;
Ne forcez point d’éclore, au sein de la froidure,
Des biens qu’à d’autres temps destinoit la nature.
Laissez aux lieux flétris par des hivers constants
Ces fruits d’un faux été, ces fleurs d’un faux printemps ;
Et lorsque le soleil va mûrir vos richesses,
Sans forcer ses présents, attendez ses largesses.

Mais j’aime à voir ces toits, ces abris transparents
Receler des climats les tributs différents,
Cet asile enhardir le jasmin d’Ibérie,
La pervenche frileuse oublier sa patrie,