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LES FABLES
LE CHEVAL S’ÉTANT VOULU VENGER DU CERF (IV,13).


Cette fable est dans Baïf, Mimes, 201, édit. Blanchemain, et dans Vauquelin de La Fresnaie.

Maintenant je diray la fable
Du sot cheval et misérable
Qui sa force ne cognoissoit :
Que le cerf avec l’avantage
De sa ramure, d’un gangnage
Leur commun herbis dechassoit.
S’en venger le cheval désire :
Qui droit a l’homme se retire,
Et devers luy ayant recours
Luy conte le tort qu’il endure,
Et luy requiert de telle injure
La raison avec son secours.
L’homme trompeur luy va promettre,
Si le cheval se laisse mettre
Un frein en la bouche, et s’il veut
Qu’armé dessus le dos luy monte.
Et qu’il le meine et qu’il le donte,
Que du cerf venger il se peut.
Le badin cheval s’y accorde :
Luy tarde que son mors ne morde.
Mais sitost que le mors eut mors.
Tant s’en faut que du cerf se vange,
Que l’homme l’asservist et le range
Esclave a jamais par le mors.

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Car il me souvient trop du cheval généreux
Qui libre, qui gaillard, errant aventureux,