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soupçons des théologiens. Des deux côtés il était fort estimé. En 1717, pour prévenir le conflit déjà menaçant, il avait ménagé chez lui une entrevue entre Lange et Wolff. Il continua à être considéré avec la même sympathie par les deux partis pendant et après la fameuse querelle. Les piétistes lui proposaient un enseignement théologique à Halle, Wolff se faisait fort de lui procurer un enseignement philosophique à Francfort sur l’Oder. S’il n’accepta pas ces ouvertures, s’il se complut dans des fonctions plus actives, comme celles d’aumônier militaire ou de premier pasteur, ce n’était pas seulement parce qu’il craignait de se jeter au milieu de disputes encore tout ardentes, c’était encore parce qu’il éprouvait le besoin de préserver de toute agitation vaine cette activité calme et persévérante qu’il sentait créée en lui pour réformer et organiser. Kœnigsberg lui offrit à souhait le milieu et les situations, où ses rares qualités d’administrateur, son esprit de prosélytisme, pouvaient se déployer à l’aise sans lui imposer le sacrifice de ses goûts pour la science et l’enseignement ; dans l’espace de quelques années, il était nommé professeur de théologie et membre du sénat de l’Université ; il était chargé, après la mort de Rogall, qui avait occupé peu de temps la succession de Lysius, de la direction du collège Frédéric ; il était élevé à la dignité de conseiller ecclésiastique et d’inspecteur général des églises, des écoles et des hospices du royaume de Prusse : il avait enfin la confiance du roi Frédéric-Guillaume 1er

Tous ces honneurs ne faisaient que consacrer une grande autorité morale, très légitimement acquise. Schultz devait le succès de sa prédication, de sa propagande religieuse et morale uniquement à l’ardeur de sa foi, à la noblesse de son caractère et de son intelligence, à la sévérité de sa propre vie, à sa sollicitude vigilante pour les membres de la communauté qu’il dirigeait. « Grand Dieu ! quel prédicateur c’était ! disait de lui son élève Trescho. Quand je pense à celle éloquence pleine d'onction, sans apprêt, qui eût