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tionne et ce qui perfectionne ton état ; évite ce qui te rend plus imparfait, toi ainsi que ton état[1]. En même temps qu’il emprunte à Leibniz ce concept de perfection, Wolff retient des diverses définitions qu’en avait données Leibniz surtout celle qui ne comportait qu’une détermination formelle, à savoir l’accord ou l’ordre dans la diversité. À cette sorte d’identité logique il ramène volontiers toute la finalité de l’action bonne. La conduite de l’homme, dit-il, résulte de divers actes ; lorsque ces actes sont d’accord de telle sorte que tous ensembles sont fondés dans un dessein unique, alors l’homme est parfait, de même que l’horloge est parfaite quand toutes les pièces s’en accordent pour cette fin, qui est d’indiquer l’heure. La conduite parfaite, c’est donc la conduite conséquente avec elle-même. Quand on jouit de la considération publique et que l’on accomplit une action louable, on obtient par là une considération plus grande, et ainsi l’état nouveau s’accorde pleinement avec l’état antérieur. Quand on est riche et que l’on fait de folles dépenses, on devient plus pauvre, et ainsi l’état dans lequel on se met est en désaccord avec l’état dans lequel on se trouvait[2]. Wolff reprend donc, mais en la dépouillant de sa signification spéculative, l'idée intellectualiste selon laquelle la bonne conduite est seule capable de soutenir jusqu'au bout ses principes dans le monde sans se contredire. Il ne remédie aux inconvénients de son formalisme trop extérieur et trop indéterminé que quand il fait rentrer sous la loi de la perfection le développement des facultés proprement humaines. L’homme, dit-il, par exemple, a une aptitude naturelle à connaître la vérité ; plus il connaît effectivement la vérité, plus il devient apte à la connaître. Aussi l’état de l’âme qui, grâce à ses multiples efforts, se maintient dans la connaissance de la vérité est en accord avec son état naturel et ne lui est nullement con-

  1. Ibid., § 12, p. 11.
  2. Ibid., § 2, § 13, pp. 45, II. — Cf. Baumgarten, Metaphysica, § 94, 6e éd., 1768, p. 26.