concours de la mémoire : or la vérité des idées est-elle de telle sorte qu’elle subsiste, même quand nous ne la percevons pas ? Si ce que nous saisissons par intuition est vrai au moment où nous le saisissons, reste-t-il vrai quand nous ne le saisissons pas ou que nous le reproduisons uniquement par la mémoire ? Puisque aussi bien le problème de la certitude est suscité par la Physique, ce problème devra être envisagé désormais dans sa généralité la plus grande et porter sur le droit de déclarer vrai non seulement le rapport des idées claires à la réalité, mais encore le rapport des idées claires entre elles. Mais il devient alors inévitable de suivre dans leur ordre régulier toutes les démarches de la raison depuis le moment où elle aborde le problème de la certitude jusqu’au moment où, l’ayant métaphysiquement résolu dans son intégrité et ayant justifié la science, elle descend jusqu’aux connaissances qui sont surtout des compléments ou des applications pratiques, la mécanique, la médecine et la morale.
Dans ces démarches la raison se montre capable de résoudre toutes les questions qui intéressent la curiosité purement intellectuelle ou le bonheur terrestre de l’homme. Mais, pour qu’elle ne s’égare pas dans des spéculations oiseuses ou incertaines, encore faut-il qu’elle délimite ce qui est de son domaine. Or de même que les événements historiques sont en dehors de la connaissance méthodique du philosophe, de même et plus complètement les choses de la foi sont en dehors d’elle. Pour le plus grand avantage de la recherche scientifique et philosophique et peut-être aussi pour sa sécurité de croyant d’ailleurs très sincère, Descartes demande qu’on mette à part les vérités révélées. Il rompt les rapports que le moyen âge avait établis entre la philosophie et la théologie ; mais il rompt aussi les rapports que la théologie a établis avec la foi : le vice de la théologie, c’est qu’elle a établi une fusion illégitime entre les données de la révélation et des théories péripatéticiennes. La foi est en elle-même