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MALEBRANCHE

II

LA DOCTRINE DE LA PROVIDENCE
DES CAUSES OCCASIONNELLES ET DE LA
VOLONTÉ HUMAINE

Est-il nécessaire de prouver Dieu, quand non seulement la doctrine des Idées, mais toute doctrine le suppose ? Il n’y a dans le fond aucune vérité qui ait plus de preuves que celle de l’existence de Dieu. On peut même, pour mieux frapper certains esprits, en employer de sensibles, montrer par exemple que la moindre modification de notre âme étant inexplicable par l’action extérieure des corps, ne peut trouver son explication complète que dans l’existence et l’action d’un Être, capable pour la produire de connaître dans leur ensemble et dans leurs moindres effets les lois générales de la nature et spécialement les lois de l’union des âmes et des corps. Mais les meilleures preuves, selon Malebranche, sont les preuves métaphysiques, celles qui considèrent directement l’idée de l’Infini, ou, pour parler plus exactement, l’Infini. Ce sont elles que Descartes a fait valoir et comme résumées quand, de ce que l’on doit attribuer à une chose ce que l’on conçoit clairement enfermé dans l’idée qui la représente, et de ce que l’existence nécessaire est enfermée dans l’idée qui représente un Être infiniment parfait, il a conclu que l’Être infiniment parfait existe. Cet argument cartésien apparaît irréfutable, surtout si l’on prend bien garde que l’idée de Dieu, qui est l’idée, non de tel être, mais de l’Être en général, de l’Être sans restriction, de l’Être infini, n’est point une idée composée qui enferme par là quelque limitation et puisse même enfermer quelque