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son effort dans ce sens reste précisé et limité par deux conditions essentielles : l’une, c’est que nous n’avons pas d’intuition intellectuelle ; — l’autre, c’est que, dans sa pensée, la détermination du rôle législateur de la raison pure reste liée à la justification de la science ; — la raison dépasse sans doute la science ; mais la science lui est immanente, et son premier rôle est de comprendre directement ce qu’elle a pour fonction de justifier. — La tentative s’imposait de libérer de ces entraves le système de la raison, et de le faire valoir pour lui-même.

C’est à Reinhold qu’appartient d’abord, pour la transformation du Kantisme en ce sens, l’initiative la plus décidée. Son adhésion à la philosophie de Kant s’était d’abord manifestée par une sorte d’exposé populaire, par ses Lettres sur la philosophie Kantienne. Appelé à professer à Iéna en 1787, il éprouva que comprendre le Kantisme assez profondément pour l’enseigner était d’une difficulté presque aussi grande que l’initiation première, et sa réflexion d’alors lui fit découvrir que, si le Kantisme était bien la vérité, l’unique vérité, il avait cependant un défaut grave, qui était de manquer du fondement réel dont il avait besoin pour s’assurer complètement. D’où le Versuch einer neuen Theorie des menschlichen Vorstellungsvermögens (1789), où il essayait de remédier pour son compte à ce défaut. Par cette œuvre, il prétendait fournir la Métaphysique à laquelle Kant, avec sa Critique, n’avait donné que des Prolégomènes. Où il marquait avec une netteté particulière sa relation à Kant, c’était dans son écrit Ueber das Verhältniss der Theorie des Vorstellungsvermögens zur Kritik der reinen Vernunft, paru dans les Beiträge zur Berichtigung