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une sorte de miracle, et même le miracle par excellence (III, pp. 158, 161. — Cf. Le Monde, I, p. 153), naturellement la conception de la chose en soi, n’étant pas admise là, ne peut pas donner à ces différences l’importance qu’elles affecteront plus tard.

Il semble que ce soit par l’intermédiaire du Platonisme que Schopenhauer ait pris possession pour lui-même du concept de chose en soi, que même il ait trouvé dans ce Platonisme une doctrine plus directement et plus complètement assimilable à sa nature que le Kantisme. En particulier le souci qu’il avait, vers 1813 et 1814, de constituer une Éthique qui ne fît qu’un avec la Métaphysique, lui faisait apprécier fortement la vérité de la philosophie platonicienne, et tout spécialement de la doctrine des Idées. Il distinguait alors entre la conscience empirique et ce qu’il appelait une meilleure conscience, — la première dirigée vers le monde sensible et régie par le principe de raison suffisante, — l’autre vers l’Idée des choses, c’est-à-dire vers leur essence et leur façon d’être, et donnant lieu ainsi, dans l’ordre théorique à l’art, dans l’ordre pratique à la vertu ; — et, à ce titre, c’était bien Platon qui était son principal inspirateur. (Nachlass, Ed. Grisebach, III, pp. 79 sq. ; IV, pp. 178 sq., 27, 222, 20 sq.)

Mais peu après, — nous en trouvons la trace dans des notes de 1814, — le rapprochement se fait, ou même l’identification s’opère dans l’esprit de Schopenhauer entre l’Idée de Platon et la Chose en soi de Kant. « La doctrine de Platon, selon laquelle ce ne sont pas les choses qui tombent sous les sens, mais les Idées, les formes éternelles, qui sont réelles, est simplement une autre expression de la doctrine de Kant, d’après la-