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muable et abstraite qui domine les différences ou au sein de laquelle les différences s’évanouissent ; l’absolu a, au contraire, pour caractère essentiel de se développer lui-même, de produire de lui-même le fini et le particulier, de se réaliser en eux ; c’est non comme substance, mais comme sujet qu’il le faut concevoir. À ce titre, il ne peut être compris que tout autant qu’il est suivi dans les divers moments de son développement. De même qu’il produit toutes choses en vertu d’une nécessité interne et dans un ordre déterminé, de même la philosophie consiste à laisser ou à faire se dérouler devant nous la genèse rationnelle et progressive de ses formes. C’est donc seulement dans une construction a priori de l’univers que le savoir absolu peut se constituer, et cette construction ne peut s’opérer que grâce à la méthode dialectique qui suit le mouvement même de l’Idée, c’est-à-dire à la fois de l’être et de la pensée.

Quelle est l’essence de cette méthode ? Elle consiste à soutenir en principe que l’isolement absolu des concepts est chose inacceptable. Mais comment expliquer à la fois que les concepts puissent être représentés comme isolés et que, cependant, ils ne doivent pas l’être ? Le concept — ou l’idée — qui constitue l’essence du réel se présente d’abord comme quelque chose d’immédiat, comme quelque chose dont la nature est d’être simplement identique avec soi-même. C’est qu’à ce premier moment il est saisi par l’entendement abstrait dont c’est précisément la loi de s’arrêter à des déterminations immobiles et de les regarder comme ayant une existence indépendante, comme se suffisant à elles-mêmes ; pour maintenir son objet tel quel, l’entendement emploie les procédés, qui lui sont chers, de scission