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ment opposés un seul peut appartenir à un sujet : c’est une loi qui est parfaitement juste dans la sphère du fini, mais non dans la spéculation qui ne peut avoir pour point de départ que l’identité des contradictoires » (t. V, p. 269).

Mais il est juste de reconnaître que la mise en œuvre rigide d’une méthode inspirée de ce principe et se développant avec une suite prolongée et une entière exactitude répugnait au génie propre de Schelling. La méthode, dans la mesure où il l’employait, n’était guère que la forme adoptée par sa pensée : elle n’en était pas la puissance motrice et directrice. Plus tard, quand dans sa dernière philosophie il combattit l’hégélianisme, il manifesta particulièrement ses répugnances pour une méthode qui vaudrait par soi et qui ne pourrait se donner l’apparence de l’efficacité que par la supposition paradoxale de concepts animés de mouvement. Au vrai, chez lui, la pensée était trop mobile, trop livrée à son propre élan pour élaborer rigoureusement des procédés techniques de démonstration : elle aimait mieux user du symbole, de l’analogie. Cependant, en reprenant la méthode de Fichte, en la faisant sortir des limites de l’idéalisme du Moi, en l’étendant à la philosophie de la nature, en la portant même jusque dans l’absolu, Schelling contribuait puissamment à ce que, dans sa dernière philosophie, il ne voulait pas reconnaître comme sien, — à faire de la dialectique non seulement l’organe de la Métaphysique, mais encore la Métaphysique même — et entendue dans le sens le plus ambitieusement compréhensif.